Dans le cadre d’un projet sur l’Accessibilité Numérique réalisé durant notre formation Access Code School, nous avons interviewé Mr Yan Motschwiller pour qu’il nous en dise un peu plus sur son quotidien en tant qu’usager du Web sourd. Nous étions accompagnés de Lauranne Chasez, interprète française de la langue des signes.
Quels problèmes principaux rencontrez-vous en tant que sourd dans la vie de tous les jours et sur le web ?
En majorité les sourds ne sont pas forcement très à l’aise avec le français à l’écrit parce que finalement pour eux c’est une langue seconde. Moi je suis sourd. Ma première langue c’est la langue des signes et donc le français est une langue seconde. Parce que je vis dans un monde qui est entendant, il y’a forcement un décalage pour l’apprentissage. Tous les sourds ne sont pas dans le même cas. Il y’a des sourds qui sont très à l’aise avec la lecture française. Ça dépend du parcours de chacun. Principalement du parcours scolaire.
Ça dépend de l’éduction des parents, des choix des parents mais c’est vrai que dans la majorité (95%) des enfants sourds naissent de parents entendants. En général ces parents ne connaissent pas le monde de la surdité. Donc la première chose qu’ils font c’est de rencontrer des médecins pour les aiguiller. Et c’est vrai que toutes les équipent médicale et la communauté sourde sont un petit peu en conflit. L’objectif principale des médecins est que les enfants oralisent, parlent pour être intégrés « pour rentrer dans le moule ». Alors que la communauté sourde préférait que la langue officielle et réelle des enfants soit la langue des signes. La communauté médicale est souvent contre ça. Cela veut dire que les parents qui ne sont pas sourd, donc qui n’ont pas d’expérience dans le sujet se retrouve un petit peu, au milieu des deux. Ils ne savent pas trop où se situer. Et finalement, naturellement ils suivent le discours des médecins même si très peu d’entre eux sont spécialisé dans le sujet.
Il y’a très peu de médecins qui essayent de découvrir la langue des signes. Ça pourrait changer si dans le cursus des médecins ils apprenaient la langue des signes. Car c’est toujours aux sourds de s’adapter. Par exemple mon médecin de famille a appris par lui-même la langue des signes et comme ça je n’ai pas besoin de lire sur les lèvres. C’est un peu devenu une référence dans le milieu des sourds. Pour les parents sourd, ils transmettent l’héritage, leur parcours. Leur identité de sourd est claire. Souvent la scolarité n’est pas adaptée. La conséquence est la difficulté d’apprentissage de la lecture. Il y’a beaucoup d’échec scolaire chez les personnes sourdes.
La pédagogie n’est pas adaptée aux personnes sourdes. Il y’a 60% d’échec scolaire. Il faut imaginer que les enfants sourds sont toute la journée dans un classe à lire sur les lèvres du professeur et ça fatigue énormément. Pour une personne sourde ce n’est pas naturel. Ce qui est naturel comme langue pour un enfant sourd, c’est la langue des signes, et non pas la lecture sur les lèvres, c’est mon point de vue. La langue des signes est quelque chose que l’on peut regarder facilement sans se fatiguer. Actuellement je passe des heures et des heures à l’utiliser. Je ne m’exprime que dans cette la langue la et je n’ai pas de fatigue. Parce que c’est ma langue, ma langue naturelle. A l’époque la langue des signes était interdite dans la scolarité. J’ai dû lire sur les lèvres et au bout d’une heure, une heure et demi on n’en peut plus. Et finalement on décroche. La concentration est maximal, vous détournez les yeux 30 secondes et vous avez perdu le discours, vous ne savez plus de quoi on parle. On est vite perdu. Sans compter aussi des mots qui se ressemblent par exemple « pain » et « bain » ou « cadeaux » et « gâteau » au niveau de la prononciation c’est la même chose. Il y’a bien sur le contexte qui aide. Toutes ces choses-là oblige à réfléchir à chaque fois au contexte, au sens de la phrase. La concentration est vraiment touché. Imaginez-vous une journée entière pour un enfant, la motivation tombe rapidement et du coup se trouve en échec scolaire.
Pour en revenir aux problèmes rencontrés sur le web, sur un internet ou il y’a beaucoup de texte, une personne sourde va se retrouver rapidement perdu. Si elle veut des informations, faire des recherches et que ce n’est que des blocs de texte sans visuel, la personne est vite noyé et au finale, se décourage. Je pense qu’il faudrait plus de visuel, plus d’image, pictogramme, symbole dessins des vidéos et raccourcir le texte.
Est-ce que lire un livre pour vous est fatiguant ?
Comme dit précédemment, ça dépend de qui. Dans mon cas je suis à l’aise avec le français. Je peux lire écrire. Je n’ai aucun souci à naviguer sur le web et à lire un site internet. Mais la majorité n’est pas dans mon cas. J’ai eu la chance d’avoir des parents sourds et du coup ils m’ont guidé dans la scolarité et j’ai pu bénéficier d’une scolarité qui était plus adapté. Ce qui n’est pas le cas de tous.
Y a-t-il une différence entre les pays par rapport à la langue des signes ?
En France la langue des signes n’est pas reconnue dans la constitution, elle n’est pas dans la 5eme république. On espère qu’on jour ça arrivera en France. Contrairement à certains pays (États unis, les pays scandinaves, l’Espagne, la Belgique) ou tous les services publique (la police, l’hôpital, tous les services administratif) sont accessibles. Par exemple en Belgique quand les parents ont un enfant sourd, ils peuvent apprendre la langue des signes gratuitement. En France ce n’est pas le cas, les parents doivent payer de leur poche. Il n’y a aucune aide. Apres c’est une question de volonté politique. Les états Unis ont 30 ans d’avance sur nous. Par exemple si je vais aux États unis, que j’arrive au contrôle des douanes, que je rencontre un policier et que je lui explique que je suis sourd il me parlera dans la langue des signes. J’ai l’ai déjà vécu et pour moi c’était du jamais vu. Ça m’a presque émue. Je me suis même demandé si mon interlocuteur était sourd et pas du tout. C’est obligatoire aux État unis que les douaniers parlent la langue des signes car c’est reconnu dans la constitution. Par exemple, toujours aux États unis lors d’un évènement important retranscris à la télé comme l’annoncement de tornades ou autre. Ils y’a toujours un interprète sur le plateau, à cotes des responsable politique qui annonce l’évènement en question. C’est obligatoire. Alors qu’en France pas tout. Il est caché, filmé dans une autre pièce, Il n’est pas à cotes des représentant politique. On le voit en tout petit à l’extrémité de l’écran, il n’est pas mis en valeur.
Pour les concerts, le théâtre etc… Comment ça se passe ?
Il existe des théâtres où se trouve un interprète à coté mais la plupart des sourds n’aiment pas ce genre de représentation. Le fait de devoir regarder l’interprète d’un cotes puis regarder la représentation de l’autres cotes casse l’immersion. Ça nous fait déconnecter des émotions, des comédiens. On ne se sent pas égale aux personnes entendantes. Dans mon cas je préfère quand les comédiens parlent directement la langue des signes. Il y’a des troupes spécialisées là-dedans. Ça permet d’être vraiment dans l’ambiance. Par exemple l’IVT (l’international visuel théâtres) qui se situe à Paris Toulouse et Lyon est la référence pour la communauté sourde.
Y a-t-il des concerts spécialisés dans la vibration ?
Les sourds n’ont pas forcement d’attrait pour la musique. Il y’en certain qui aime bien ressentir le rythme et l’apprécier. Mais pour la majorité des sourds ce n’est pas le cas. Dans mon cas par exemple la musique n’a pas vraiment d’intérêt. Apres tout ce qui est musique classique ou il n’y a pas de basse, ou l’on ne ressent pas le rythme, n’est pas vraiment adapté pour les sourds. Les musiques avec beaucoup de basse ou avec des percussions comme du djembé sont bien plus adaptées à notre situation. Il y’a des nouveaux moyens techniques qui ont été crée il n’y pas très longtemps, ce sont des gilets qu’on attache dans le dos avec un système de vibration. Il y’avait également des caissons vibrants ou l’on pouvait se mettre dessus, avec des basses à l’intérieur le tout lié à la personne ou le groupe qui fait la représentation musicale. Il y’a une salle qui s’appelle « la vapeur » qui organise des concerts accessibles aux personnes sourdes. Récemment il y’a eu un championnat de Beatbox qui a été adapté aux personnes sourdes. J’ai eu l’occasion d’y être invité et j’ai pu essayer ces gilets et caissons. Ça transmet pas mal d’émotion et c’était une belle expérience. Etant une personne habituée au silence toute ces vibrations m’ont un peu fatigué et je ne suis pas resté jusqu’à la fin. Mais il y’a d’autre personnes qui ont adoré ce principe et qui sont restés jusqu’au Bou. C’est vrai qu’il y’a quand même une différence culturelle entre le sourd et les entendants. Notamment lors des fêtes les entendant aiment la musique, les lumières danser etc. on pourrait même dire qu’ils ont besoin de ça. Une fête sans musique pour un entendant ce n’est pratiquement pas envisageable.
Les jeux sont-ils adaptés pour vous ?
Une fois que les règles sont expliquées La plupart des jeux de sociétés sont adaptés. Nous n’avons de soucis de ce cotés-là. Il y’a tout de même quelques exceptions. Je pense notamment au jeu ou le but est de faire découvrir un mot en français ou de faire des jeux de mots. Des jeux comme le trivial poursuite ou il y’a beaucoup de texte nous pose aussi problème, étant toujours lié à la compréhension du français. Du cotes des jeux vidéo nous n’avons aucuns soucis, tout est visuel. C’est facilement compréhensible.
Y a-t-il des applications ou sites qui dérangent au quotidien ?
Oui, je pense notamment à un sous-traitant de SFR (RED) Ou la plateforme n’est pas adapté aux personnes sourdes et la seule façon de les contacter est de leur écrire, ce qu’il n’est pas accessible à tout le monde. Il y’ a d’autre plateforme comme celle de mon assurance ou tout est entièrement accessible. Par exemple si je suis en panne je peux les contacter très facilement, il y’a un service dédié à notre cas où je peux parler en Visio avec la personne concerné. Les réseaux sociaux sont en générale adaptés aux personnes sourdes et je dirai même que nous en avons besoin. Ça nous aide énormément pour avoir des informations qui circule. Les sourds sont en générale en retard sur les entendants. Par exemple en voiture vous avez la radio etc. et les réseaux sociaux nous aident sur ce sujet-là. C’est pratiquement une révolution pour nous, ces outils nous sont vraiment utiles. WhatsApp est également très utilisé car nous pouvons envoyer des vidéos allant jusqu’à une durée de 6min. Ce qui n’est pas le cas de Facebook par exemple ou les vidéos sont limités à 2min. Je communique avec tous le jours. Face time à également été une révolution, un vrai bon en avant. Beaucoup de sourd préfèrent l’iPhone pour cette raison.
Comment ça se passe quand vous allez au cinéma ? Trouvez-vous des séances sous-titrées facilement ?
Le sous-titrage des films est extrêmement important. Par rapport au cinéma nous trouvons des séances assez facilement. Le souci dans les petites villes c’est qu’elles ne sont projetées en générale qu’en semaine. Ce qui est assez problématique. La plupart du temps quand on veut voir un film c’est plutôt le Week end. Nous avons aussi un problème avec les films français qui sont très rarement sous-titrés. Mais ça commence petit à petit à arriver.
Quand vous prenez le train, il y a certaines informations qui sont dites à l’oral. Comment faites-vous dans cette situation ?
La SNCF à un avatar maintenant. Sur les écrans il peut y avoir de la langue des signes. Après ce n’est pas parfait, c’est en phase d’expérimentation mais ça n’avance pas beaucoup depuis quelques années. Apres imaginons que je suis à Paris sur le quai, j’attends le train, et si je vois qu’il commence à y avoir un peu de retard : ce que font les sourds en générale c’est de regarder la réaction, le comportement, l’attitude des gens. Quand par exemple les gens commencent à tendre l’oreille là on se dit : « tiens, il y a un message qui est en train de se faire à l’orale. » » On va voir les gens qui prennent leur téléphone pour appeler, qui vont faire la grimace, ça va nous mettre la puce à l’oreille et on va aller voir ce qui se passe à l’écran. Le vrai souci c’est quand on est dans le train et qu’il n’y a pas d’écran. L’informations n’est que sonore et on se retrouve vraiment sans accessibilité. Imaginons que le train s’arrête brutalement, on va devoir aller demander au voisin, en essayant d’écrire un message sur le téléphone par exemple.
Y a-t-il des applications ou des sites internet qui sont populaires chez les malentendants ?
Instagram, Skype, Facebook pour le coté communauté. Il y a l’application 114 pour les numéros d’urgences. On peut choisir d’échanger à l’écrit ou en langue des signes. Et c’est gratuit.
Et YouTube, pour le divertissement peut-être ?
Oui pas mal. Par exemple pour des travaux c’est souvent sous-titré, après le problème c’est que le sous-titrage est souvent de mauvaise qualité sur YouTube, la plupart du temps ça ne correspond pas du tout.
Avant on pouvait sous-titrer les vidéos des autres, maintenant c’est impossible. On ne peut plus sous-titré les vidéos des autres. Ça s’est arrêter en septembre à cause d’abus et de spams. Une autre asso nous a dit que c’était un vrai problème.
Je ne savais pas je viens de l’apprendre.
Y a-t-il des youtubeurs, des personnes publics, qui sont connus chez les sourds ?
Oui bien sûr, des comédiens, dans le sport, le cinéma, il y en a qui font des conférences.
Un nom vous vient en tête ?
La première qui me vient en tête c’est Emmanuelle LABORRIT, comédienne qui a eu un Molière. Elle est investie politiquement pour la communauté sourde. C’est une référence dans le milieu. Victor ABBOU comédien hors pair, et David de KEYZER, organisateur d’évènements mondialement connu, il organise le festival clin d’œil, où des sourds du monde entier viennent participer. C’est un festival de théâtre, d’arts et de danse, pendant 4 jours en juillet. Et il est en train d’organiser le même festival aux Etats-Unis.
Qu’est-ce qu’il y a comme différence entre une personne sourde de naissance et une qui l’est devenue après ?
Je vais déjà éclaircir un point, j’avais vu que vous aviez du mal à dissocier les mots malentendant et sourd. Vous l’utilisiez comme si c’était la même signification. Dans la vie de tous les jours, je suis une personne sourde. Je suis né sourd. Après, chez un enfant qui naît entendant et qui devient sourd vers ses 3 ans, il y a plusieurs solutions : la langue des signes ou bien oraliser mais du coup il fait partie de la communauté sourde. Après chacun a le choix de son mode de communication. Quelqu’un qui a eu l’audition reste dans le monde des entendants. Parce qu’il saura parler, il sera malentendant mais sa première identité sera entendant. Pour ceux qui sont né sourds ou l’ont été très jeunes, certains portent des appareils, d’autres pas, mais la première identité sera sourde.
Je fais pas mal de sensibilisation, dans des structures, pour des personnes entendantes, pour expliquer le quotidien. Et on voit souvent des journalistes qui disent « malentendant » alors que non, je suis sourd. Pareil, on dit souvent « langage des signes » alors que non, c’est une langue. Le mot langage dévalorise un peu la langue. Comme si c’était un début de langue. La langue des signes est une vraie langue, avec une grammaire, une syntaxe…
Il peut y avoir des personnes sourdes qui oralisent, d’autres qui sont en langue des signes, peu importe, on est sur de la surdité. Les malentendants ne sont pas dans ce monde-là et dans ce combat-là.
Comment se déroulent les cours à distance ?
Alors à distance, par exemple à l’université paris XVIII, j’ai déjà donné des cours à des futurs formateurs, on fait des cours via zoom. On peut y partager un PowerPoint… Il faut être plus attentif donc on fait plus de pauses.
Il y a aussi des plates-formes sur Moodle, pour enseigner la LSF* à distance. En France il y a des écoles bilingues, donc l’enfant suit une scolarité standard, normale, avec des professionnelles en plus, donc ça se fait directement en LSF et a l’écrit. Il y a des écoles bilingues et des instituts spécialisés.
Est-ce que c’est gratuit ?
Oui, après comme dans le système classique il y’a des écoles publiques. Les instituts spécialisés sont dépendants du ministère de la santé, parce qu’on considère toujours qu’être sourd c’est être malade, finalement. Alors que les écoles bilingues sont rattachées au Ministère de l’éducation.Il y’a une méthode qui s’appelle l’intégration : c’est-à-dire qu’on met un enfant sourd dans une classe d’entendants avec un AESH* qui répète à l’enfant. Mais il est vite noyé. Nous on est contre ce système d’intégration. L’épanouissement n’est pas là, il n’a pas de communication aisée, c’est compliqué.Il y a peu d’écoles bilingues, il y a Poitier, Paris, Toulouse, et Lyon. Donc si on ne peut pas déménager, ce n’est pas évident. Donc beaucoup de parents décident d’envoyer leurs enfants en intégration.
Est-ce que le fait d’être sourd influe sur l’équilibre ?
Oui, par exemple un bébé qui devient sourd, peut être due à une méningite. Ils peuvent y avoir des problèmes d’équilibre dû à ça. Personnellement je n’ai pas eu ce problème car je suis né sourd. Ça dépend des gens. Il y a tellement de possibilités, de manières de devenir sourds. Mon épouse quant à elle a des soucis d’équilibre de temps en temps.
Votre épouse est-elle née sourde ?
On ne sait pas, ses parents ont découvert sa surdité quand elle avait 2-3 ans. Sa maman était professeur d’école et quand elle était enceinte elle à attraper des maladies du a ses élèves ce qui a pu développer le fait qu’elle soit devenue sourde. Il y’a tellement de facteurs qui rentre en compte que c’est très compliqué de savoir.
La surdité n’est pas héréditaire ?
Non, il y’a seulement 5% d’hérédité. Avant le XIXème siècle, les hommes et les femmes sourd n’avait pas le droit de se marier ensemble, car on pensait que sinon il y aurait de plus en plus de sourds, mais l’on s’est rendu compte que dans 95 % des cas cela ne posait pas de problèmes. Après l’hérédité est une question de génétique, mais il y a tellement de possibilités qu’on ne sait pas à l’avance.
Est-ce que tous les sourds savent lire sur les lèvres ?
Je suis né en 70, donc c’était une période vraiment portée sur l’oralisme. La langue des signes était interdite. Ça veut dire que j’ai grandi à l’école en étant obligé d’oraliser et lire sur les lèvres. C’est vrai que du coup je n’étais pas à l’aise pour m’exprimer, je me sentais limité dans la communication. En langue des signes je n’ai plus aucune difficulté, c’est ma langue. Comme ce matin, vous me posez des questions et je n’ai aucune difficulté à y répondre, je suis à l’aise et c’est naturel pour moi. C’est vrai que ça a été une enfance assez difficile, beaucoup de séances d’orthophonie pour apprendre à vocaliser.
Actuellement je n’utilise jamais ma voix. En 1991 la langue des signes à été autorisé dans l’éducation grâce à la loi Fabius. Les parents avaient enfin le choix de l’éducation de leurs enfants. Ils avaient le choix d’une école bilingue ou d’un autre parcours pour leurs enfants. Le problème c’est qu’en 1991 il n’y avait pas d’école bilingue. Ce n’était pas encore développé. Les parents avaient un choix qui n’était finalement pas réel. J’ai dû aller dans une école spécialisée. En 2000 les écoles bilingues se sont développées dans les 4 grandes villes nommées précédemment. A Dijon il y’a une association, l’APES (Association de Parents d’Enfants Sourds) qui qui a été créée par des parents d’enfants sourds il y a 3-4 ans, et eux leur combat c’est d’ouvrir une école bilingue à Dijon.
Quelles conséquences ont les masques sur la compréhension d’autre personnes chez les sourds, y a-t-il un véritable impacte ?
Oui ça a des conséquences. Déjà parce que si je rencontre une personne je ne sais pas si elle parle ou pas. Je ne sais pas trop comment réagir, je suis toujours dans l’hésitation. Dans mon cas ça ne m’impacte pas énormément car je passe souvent par l’écrit et je suis très à l’aise avec la langue des signes. Mais des personnes qui communiquent principalement avec la lecture des lèvres et l’orale sont énormément impactées. Je n’ai pas besoin de de lire sur les lèvres par contre j’ai besoin du visuel, de voir la réaction sur le visage, on voit les mimiques, le mouvement de la bouche, des expressions etc… Sans ça je ne sais pas si la personne est sympathique ou non. Contente ou non, le masque me gêne pour ce genre de situation. L’interprète est obligé d’enlever le masque pour que je puisse voir les expressions.
Cet article a été publié à l’origine sur le site a11é : https://www.nicolasmaes.fr/a11e/